Picasso, Le rayon ininterrompu

Résumé

Extraits du texte de Rafael Alberti

Toujours impressionnante, cette immense nef de la grande chapelle Clémentine du Palais des Papes d'Avignon : on la dirait bâtie tout exprès pour cette invasion de Picasso, dont les œuvres couvrent les murs énormes, presque jusqu'à les cacher.

Voilà, exactement trois ans qu'il prit d'assaut cette forteresse, à la tête d'une armée étrange de mousquetaires audacieux, de capitaines à la mine patibulaire et de cavaliers espagnols, de baisers farouches, d'accouplements extravagants, de fumeurs de pipes, d'arlequins furieux, d'enfants gracieux et apeurés...À l'époque, les envahisseurs étaient au nombre de 167, sans compter les 50 grands dessins représentant des sujets

et des personnages semblables à ceux des tableaux. Maintenant il y en a 201, soit 30 tableaux de plus que dans l'exposition  antérieure...

Oh jeunesse, ton nom sera toujours Picasso !

Chaque aurore, il te faudra  te baigner en lui, te contempler en lui  au soleil de midi et chaque nuit, pour rêver avec lui, fermer tes yeux pour rencontrer les siens, terribles, tyranniques et profonds, tels deux têtes de clous à la fixité insupportable.

Son élan vital impressionnant, son dynamisme sans faille, son appétit  de temps, son obsession de ne laisser une seule minute  de son existence qui ne fût consignée, rien de tout cela  ne s'est relâché un seul instant ; en d'autres termes, le taureau impétueux  de son sang ne s'est arrêté de foncer qu'à la seconde où, près de 92 ans, son cœur lui a porté l'estocade de son dernier battement.