François Bon, Antoine Stéphani
Ecrivain(s)
Résumé
Construit à la place de l'ancien Palais de l'Industrie, face à la tour Eiffel toute neuve, pour être l'écrin éphémère d'une rétrospective d'art dans l'Exposition universelle de 1900, le Petit Palais témoigne des rêves et contradictions de l'architecture dans ce temps de grande mutation.
Les travaux du Petit Palais ont été une chance d'archéologue : on met à jour la façon dont la ville en 1900 se transforme. Et cela passe par l'idée de palais, lieu séparé de la ville et de la vie ordinaires, que les herbes sauvages, les tapis usés et les plâtres pourtant nous réenseignent.
Pour François Bon, « La découverte des photographies d'Antoine Stéphani a été comme de découvrir un secret caché dans la ville. Un peu comme La Faute de l'abbé Mouret de Zola ou Honorine de Balzac, la vieille fascination qu'on a à entrer dans un lieu interdit, un espace clos, et tout rempli de rêve. En plein milieu de Paris, et quel lieu symbolique, un mystère comme dans les romans de l'enfance. »
Chaque dimanche, le photographe s'est isolé dans les galeries, les sous-sols, sur les toits. Il ne s'agissait pas de photographier une ruine, un chantier : mais un évidement provisoire qui laisse résonner toute notre curiosité, notre passion de la ville en transformation constante. Le palais à nouveau vide, on rêve : comme dans une chambre optique, la ville s'y reflète, mais virtuelle, silencieuse. Ces photographies donc ne témoignent pas d'une réfection technique, mais interrogent un temps en suspens. L'idée de la modernité, et la très vieille ou enfantine passion de pénétrer des lieux inaccessibles soudain clandestinement offerts.
François Bon s'est laissé entraîner par le photographe dans les perspectives et les échappées d'une architecture où il a pris plaisir à se perdre.
Entremêlant circulations réelles et circuits d'une mémoire collective, il a capté l'énergie et la vitalité qui continuent de rayonner du silence et de la lumière.
Fasciné par les contradictions de ce bâtiment initialement conçu comme lieu éphémère d'exposition, paradoxalement vide ici, et cependant promis à un nouveau destin, François Bon est allé jusqu'à imaginer la gageure qu'avait représentée pour Charles Louis Girault cette impossible « échancrure triangulaire » au cœur de la ville.
Imaginer la fièvre qui s'était emparée de lui pour trouver « le geste d'architecte » : un trapèze et cinq cercles, « comme une onde qui se propage, ronge la ville, englobe les arbres autour, place l'horizon haut de la ville comme un attouchement de son bâtiment même ».