Un goût exquis, Essai de pédesthétique

Antoine Pickels

Ecrivain(s)

EAN: 9782702208038 2006 200 pages broché

Résumé

Essai de pédesthétique

Et si le goût exquis que l'on prête si aisément au pédé (comme au nègre le sens du rythme, au juif celui des affaires, et à la femme « l'intuition »), si ce goût exquis qui fait de lui un meilleur coiffeur, styliste ou décorateur était justement ce qui fonde son actualité ?

Jean Genet croyait les pédés incapables d'une pensée politique originale mais convenait par ailleurs que toute esthétique suppose une morale.
Or, l'esthétique fabriquée en 100 ans de définition par les autres (depuis l'invention de l'« homosexualité ») et 30 ans d'auto-définition (depuis la « gay lib ») pourrait-elle générer une éthique ?
Cette éthique déterminer une attitude, une manière d'appréhender le monde ? Cette attitude aurait-elle des conséquences quotidiennes, des conséquences politiques, au sens le plus large du terme ?
Alors, cette pédesthétique pourrait être le fondement d'une pensée active qui ne cède ni au repli de la communautarisation, ni aux reniements de l'intégration.
Antoine Pickels vérifie cette hypothèse en deux temps.
Dans la première partie, Subversion ou obédience, il expose les tensions contradictoires qui tiraillent actuellement les pédés occidentaux, à partir de leur volonté de conformisme ou de leur capacité de subversion. Il discerne comment, depuis une clandestinité qui assurait paradoxalement aux pédés une forme de visibilité, on est passé à une visibilité qui demande en fait au pédé de disparaître ; il se penche ensuite sur certains domaines - église, famille, religion, armée... - où la volonté de conformisme produit différentes aberrations ; il approche enfin les tentatives contemporaines pour maintenir une forme de subversion « homosexuelle », les impasses dans lesquelles ces tentatives s'engagent, et l'intérêt qu'elles gardent néanmoins.

Dans la deuxième partie, Devenir pédé, l'auteur offre, en réponse possible à ces interrogations, une esquisse de définition d'une esthétique pédé et de ce qu'elle implique comme attitude. À cette fin, il regarde quelques œuvres d'artistes pédés modernes et contemporains - écrivains, plasticiens, cinéastes, hommes de théâtre - à la lumière de cette question ; essaie de dégager quels choix sont faits dans ces œuvres, et en déduit une vision du monde ; enfin il développe les implications « morales » et politiques de cette esthétique.

En conclusion, il s'engage sur la piste d'une mise en pratique de cette « pédesthétique », ici et ailleurs.
Écrit avec verve, franchise et humour, l'ouvrage n'a de prétention ni à l'exhaustivité ni à la science. L'analyse et l'engagement y cheminent de concert. Un texte qui, quoique revendiquant hautement sa subjectivité, est susceptible d'intéresser chacun, quelles que soient ses préférences sexuelles : le rapport original créé ici entre sexe, art et politique, comme l'intérêt d'une pensée minoritaire sur la majorité, y sont en effet d'une pertinence rare dans le contexte actuel de nivellement de la pensée.